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Education en Guyane : une situation préoccupante selon le Défenseur des droits et l'Unicef

C’est un constat alarmant que dressent le Défenseur des droits et l’Unicef France qui viennent de publier un état des lieux sur l’effectivité du droit à l’éducation en Guyane. L’étude, menée entre septembre 2019 et avril 2021 par une équipe de quatre chercheurs des universités de Guyane et de Nanterre, intitulée « Guyane : les défis du droit à l’éducation », pointe une série d’insuffisances et de dysfonctionnements chroniques impliquant un important décrochage scolaire et des changements à mettre en place d’urgence.

  • Par: Radio Péyi avec Outremers360
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« Le système éducatif guyanais est confronté à de nombreux défis d’ordres géographique, démographique, économique, culturel et linguistique. » Si la Guyane constitue l’une des plus petites académies de France, ses effectifs de scolarité sont en constante croissance. En 2020, note l’étude, le département comptait 85 149 enfants scolarisés, avec 33% de la population âgée de moins de 14 ans, et 23% de 15 à 29 ans.

« La Guyane affiche une insuffisance d’infrastructures scolaires, impliquant des taux de remplissage de 140–150% dans certains établissements, un manque d’adéquation entre l’implantation des établissements et les lieux où les besoins de scolarisation sont croissants et des difficultés d’inscriptions scolaires pour de nombreuses familles, en particulier celles vivants dans les quartiers d’habitat informels », relève le rapport. « La durée, le coût et/ou la dangerosité des transports scolaires (pirogue, bus, taxi privé ou encore l'auto stop) sont des facteurs d’absentéisme et de décrochage scolaire importants. Enfin, l’absence de restauration scolaire dans un grand nombre d’établissements constitue une carence grave sur un territoire où de très nombreux enfants vivent sous le seuil de pauvreté et sont scolarisés à distance de leur lieu de résidence. »

Pour les auteurs de l’étude, ces réalités sont anciennes et persistantes. Ils notent par exemple l’insuffisance du maillage territorial en infrastructures, un certain nombre de pratiques discriminatoires, comme l’exigence illégale de pièces administratives que certaines familles ne peuvent produire, les « refus guichet » et les refus de scolarisation frappant notamment les jeunes étrangers. Il y a également la paupérisation des familles qui occasionne des difficultés chroniques d’accès à l’école liées au coût du transport ou aux responsabilités familiales portées par certains enfants, qui se traduisent notamment par un absentéisme scolaire important. En outre, « la situation administrative précaire des personnes de nationalité étrangère, ainsi que leur maîtrise imparfaite de la langue française gênent le suivi de la scolarité. » 

© Défenseur des droits et Unicef France  

« Si l’instruction obligatoire est prolongée depuis la rentrée 2020 par une obligation de formation pour les 16-18 ans, en Guyane les efforts à fournir pour respecter cette obligation sont considérables. À ce jour, près de 15% des 15-17 ans ne sont pas scolarisés, contre 5% en moyenne nationale », précise le rapport. Certains chiffres sont particulièrement inquiétants. À Matoury, une ville du littoral, 46% des plus de 15 ans non scolarisés sont sans diplôme. À Saint-Laurent du Maroni dans l’ouest, ce chiffre monte à 51%, et il atteint un record de 91% à Grand-Santi, autre commune dans le centre ouest proche du Suriname. 

« Aux défis liés à l’accès à l’école des enfants en Guyane s’ajoutent de multiples facteurs venant amoindrir la qualité éducative dans cette académie. La Guyane fait face à un manque structurel d’enseignants titulaires ainsi qu’à une difficile prise en compte de la diversité linguistique et culturelle (70% des enfants n’ont pas le français pour langue maternelle) », déplore également l’étude. Le territoire possède une faible attractivité, à cause notamment de ses nombreuses zones isolées. La demande de scolarisation se heurte à un manque structurel d’enseignants titulaires, certes compensée en partie par l’encouragement de mobilités professionnelles depuis l’Hexagone, et le recours massif à des contractuels pour pourvoir les postes vacants. Le problème est qu’en général ces derniers sont non ou mal formés, surtout aux réalités des régions où ils sont affectés.

Pour finir, le document effectue plusieurs recommandations, en matière d’accès et de qualité scolaires, ainsi que d’accompagnement général de l’enfance et de la jeunesse, et notamment : « assurer une mise en œuvre effective de l'obligation scolaire sans omettre les enfants vivant sur les territoires isolés ; assurer l'accès à un repas/collation quotidien, le transport scolaire à tous les élèves (gratuité des transports fluviaux scolaires et création d'un nombre de places suffisantes pour garantir le déplacement de tous les élèves) ; mettre en place un plan d‘action en faveur de l'accès à l'école des enfants des communes isolées (développement des places d'internat, amélioration des conditions de transport scolaire fluvial) ».