Apprendre à nager pour sauver des vies : l’urgence d’un plan natation

Le drame survenu la semaine dernière à la plage de Gosselin résonne douloureusement en Guyane. Car il ne s’agit malheureusement pas d’un cas isolé. La noyade est une cause majeure de mortalité chez les enfants rappelle Claude Brigon, président de l’association « Ma Guyane nage » :
« En 2018, une thèse médicale révélait que 26 % des décès chez les 5-15 ans étaient dus à des noyades. C’est la première cause de mortalité dans cette tranche d’âge ».
Une réalité alarmante que les chiffres peinent encore à refléter avec précision. « On est encore à plus de 49 % de non-nageurs en classe de 3e, alors que l’objectif de l’Education nationale est que tous les élèves sachent nager à la fin de la 6e », explique Claude Brignon. Pour y remédier, il appelle à la création d’un observatoire des noyades spécifique à la Guyane : « Aujourd’hui, on manque de données claires. Il faut qu’on sache où on en est pour progresser. »
La réponse doit être structurelle et globale selon Ma Guyane nage
Pour pallier le problème, selon l’association, la solution passe par des actions de sensibilisation, mais surtout par une véritable politique d’apprentissage du « savoir nager » : « Nous, on cible les enfants de 5 à 12 ans. Mais il faut aussi intervenir dans les collèges et les lycées, car beaucoup d’adolescents se noient aussi », alerte Claude Brignon. À Kourou, par exemple, seules 4 piscines sont disponibles pour former 2 000 collégiens et lycéens.
© Formation dans les villages isolés - photo : Ma Guyane nage
Le manque criant de compétences locales complique davantage la situation. C’est pourquoi l’association a lancé ses propres formations :
« On a créé un organisme qui forme des surveillants de baignade et désormais des maîtres-nageurs. Dès septembre, 14 jeunes Guyanais seront diplômés. Mais cela ne suffit pas. »
Former davantage de maîtres-nageurs, notamment issus des communes éloignées, est l’une des priorités. « Il faut qu’il y ait plus de compétences en Guyane. On mise sur la jeunesse. Par exemple, Malcolm, qu’on a découvert à Maripasoula, a commencé sa formation en nageant dans le fleuve. Il va la poursuivre à Cayenne », illustre le président de Ma Guyane Nage. Mais les besoins restent énormes :
« Sur les bassins publics uniquement, il manque déjà 24 maîtres-nageurs. Et je ne parle pas du manque dans les clubs, plages, criques ou associations. »
© Installation de piscine éphémère durant les grandes vacances dans les quartiers - Photo : Ma Guyane nage.
Dans un territoire où l’eau est omniprésente, des rivières aux plages, en passant par les piscines privées, la prévention ne peut plus attendre. « À court terme, il faut surveiller les lieux de baignade. Mais à long terme, il faut éduquer. Apprendre à nager, c’est sauver des vies », conclut Claude Brignon.
Emission : interview complète de « L’invité du 7h » Claude Brignon